dimanche 30 novembre 2014

De la viande de baleine pour les touristes musulmans ?


L’abattage de requins baleines pourrait être un moyen d’attirer au Japon des touristes musulmans, issus notamment des pays arabes et de la Malaisie.

A l’issue d’un moratoire de près d’un an, le Japon annonce un programme de pêche de la baleine dans le cadre d’un « programme scientifique ». Cette décision survient quelques mois après que la Cour internationale de la Justice de l’ONU ait reconnu illégale la pêche à la baleine par les sociétés japonaises dans l’océan Austral et a décidé de l’interdire. Le Japon a promis de respecter cette décision de la cour, et récemment, le gouvernement du pays a publié un nouveau programme de recherche sur les cétacés qui s’appelle NEWREP-A. Ce programme remplace le programme précédent JARPA II. Il prévoit notamment l’élargissement de la zone de pêche au mammifère. Si jusqu'à présent les baleiniers japonais pêchaient principalement au Sud des côtes de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, le nouveau programme étend la zone de pêche à près de deux tiers de la côte antarctique dans l’Atlantique du Sud et à la zone Sud-est de l’océan Pacifique.

Selon le nouveau plan japonais, 333 petits rorquals peuvent être pêchés « pour la science » à l’aide de canons-harpons. L’institut de recherche japonais, qui se spécialise dans l’étude des baleines, explique cette méthode de la manière suivante : « Après avoir réalisé une étude scrupuleuse, nous sommes arrivés à la conclusion que les informations sur l’âge des animaux que nous récoltons chaque année, peuvent être obtenues uniquement par des méthodes d'échantillonnage létales. C’est pourquoi nous employons ces méthodes dans ce programme ».

La Commission baleinière internationale (CBI) a interdit la chasse à la baleine dans des buts commerciaux en 1986. En 1994, une déclaration a été adoptée sur la création en Antarctique du Sud d’une réserve pour ces mammifères. En outre, conformément à la résolution de la CBI, tout programme de chasse à la baleine, même dans un but de recherche scientifique, doit être approuvé au préalable par la Commission. Le Japon devait déposer son plan de recherche à la CBI le 20 novembre. Mais les autorités japonaises ont reporté la demande à la réunion suivante qui aura lieu au plus tôt dans un an. Toutefois, des craintes existent que la chasse à la baleine commencera dès cet hiver.

Selon Anna Filimonova, experte de la filiale russe du Fonds international pour la protection des animaux, il s’agit d’une violation du moratoire international.

« Ils motivent la pêche à la baleine par le fait qu’il s’agit d’une activité de pêche autochtone, autorisée à certains pays à condition de respecter les quotas. Les japonais parlent ici d’une pêche « à des fins scientifiques ». Il faut rappeler que nous vivons au 21e siècle. La science contemporaine n’utilise pas de méthodes létales pour étudier les baleines. Par exemple, dans la zone de l’île de Sakhaline, en Extrême-Orient, nous soutenons financièrement un groupe d'observateurs des baleines grises. Ces observateurs sortent en mer et prélèvent des échantillons directement sur le tissu des mammifères. Il existe des méthodes qui ne provoquent pas la mort des baleines et ces méthodes suffisent pour reconnaître l’ADN des animaux et pour mener d’autres recherches. Je ne comprends pas quelle procédure scientifique doivent pratiquer les chercheurs japonais au point de vouloir tuer les baleines ? C’est une pratique très étrange, autant du point de vue de l’écologie que de la science moderne. Et le fait qu’ils fassent référence aux traditions alimentaires, cela est encore plus étrange. De nombreuses études et enquêtes ont montré que les Japonais modernes n’ont pas un besoin vital de manger les baleines. Du moins, pas en si grande quantité. Je suppose qu’il s’agit d’un projet commercial, pour lequel quelqu’un au Japon fait du lobbying… »

L’abattage de requins baleines pourrait être un moyen d’attirer au Japon des touristes musulmans, issus notamment des pays arabes et de la Malaisie. L'année dernière, l'Association des baleiniers japonais a reçu la certification « halal » sur les baleines, et aujourd’hui le Japon exporte de la « viande de baleine halal » vers les pays musulmans au même titre que la viande de bœuf. Il faut noter que les deux aliments possèdent des propriétés nutritionnelles similaires. Malgré une communauté musulmane relativement peu nombreuse au Japon (pas plus de 100.000 pratiquants), les restaurants japonais sont de plus en plus nombreux à passer au « halal ». Certains restaurateurs ont même intégré dans leur menu la « viande de baleine halal ». D’ailleurs le Japon organise ces jours-ci une foire halal, composée de produits alimentaires fabriqués au Japon.

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