En 1867, alors
qu’il était à Paris, l’empereur russe Alexandre
II se promenait dans le jardin de Tuileries. Soudain, il fut approché par
une gitane. « Souverain, Vous permettez
que je Vous dise votre avenir ». Pris de stupéfaction, l'empereur accepta.
La femme mit longtemps à examiner les lignes sur la paume du monarque : « Ta vie ne pendra six fois qu’à un fil mais
c’est la 7e fois qui te deviendra fatale ». Alexandre II frémit. Il se
souvint qu’il y a un an à Pétersbourg il échappa de justesse à la balle d’un
révolutionnaire. L’empereur fut sauvé par un paysan qui se tenait à côté du
terroriste. Il lui tapa sur la main en faisant dévier la trajectoire de la
balle.
On ignore si
Alexandre II se souvenait des paroles de la gitane mais la prophétie finit
bientôt par se matérialiser. Le 6 juin, l’empereur allait dans un landau
découvert acclamé par une foule enthousiaste. Soudain des coups de feu
retentirent et des balles sifflèrent à côté de l’empereur en blessant son
cheval. Les gardes se jetèrent sur le malfaiteur qui se révéla être un
Polonais. Il voulait se venger sur l’empereur d’avoir écrasé l’insurrection en Pologne
qui faisait alors partie de l’empire de Russie.
Ayant subi
deux attentats en deux ans, Alexandre II crut fermement à la prophétie. Libéral
convaincu, le souverain communiquait toujours ouvertement avec le peuple mais
ses gardes étaient aux aguets et personne ne pouvait plus approcher l’empereur
dans la rue comme avant. Pour toute réponse, l’organisation révolutionnaire
radicale « Volonté du peuple » se
livra à une terreur de masse contre les représentants du pouvoir. Les attentats
visaient des policiers, des officiers et des gouverneurs mais c’est l’empereur
qui était la cible principale des terroristes.
Un nouvel
attentat contre Alexandre II fut commis le 4 avril 1879. Un révolutionnaire fit
feu 5 fois sur lui avant d’être saisi par les gardes. C’est par miracle que
l’empereur eut la vie sauve. L’attaquant fut exécuté par la suite. Après trois
échecs successifs, les terroristes renoncèrent aux armes de tir et optèrent
pour la bombe qui leur paraissait être un moyen plus sûr. Ils décidèrent donc
de faire sauter le train de l’empereur. Les terroristes savaient qu’un train de
marchandises chargé de bagages précédait celui dans lequel allaient l’empereur
et sa suite. Mais le destin sauva à nouveau l’empereur : la locomotive tomba en
panne en chemin et le train d’Alexandre II alla le premier. Les terroristes qui
l’ignoraient le laissèrent passer et firent sauter le train suivant. « Mais qu’est qu’ils ont contre moi, ces malheureux?
– prononça amèrement l’empereur en apprenant qu’un nouvel attentat venait d’être
perpétré – Pourquoi me poursuivent-ils comme une bête sauvage? J’ai pourtant
toujours fait tout ce qui était en mon pouvoir pour le bien du peuple! »
Les « malheureux » préparaient
cependant un nouveau coup en décidant de faire sauter Alexandre II dans son
propre palais. « Volonté du peuple »
parvint à placer son homme parmi les ouvriers qui réparaient les salles du
palais. Il amenait la dynamite dans le sous-sol en la dissimulant parmi les
matériaux de construction. Un dîner solennel était prévu au palais le 18
février 1880 en l’honneur de l’arrivée à Pétersbourg du prince de Hesse. Le
terroriste fixa la minuterie de la bombe à 18 heures mais le hasard s'y mêla à
nouveau car le train du prince fut en retard d’une demi-heure. La terrible
explosion coûta la vie à 10 soldats de la garde impériale en blessant 80
autres, mais Alexandre resta intact comme si une force mystérieuse conjurait la
mort.
Bientôt la
police dépista les dirigeants de la « Volonté
du peuple » mais les révolutionnaires fanatiques étaient toujours après
l’empereur.
Le premier
mars 1881, Alexandre II longeait dans son carrosse le quai du canal Catherine à
Pétersbourg accompagné d’une petite escorte de cosaques. Soudain, un passant
lança un colis. Une explosion assourdissante se fit entendre. Lorsque la fumée
se fut dissipée, le quai était jonché de morts et de blessés mais Alexandre II
resta encore intact. Il fallait partir au plus vite mais l’empereur descendit
du carrosse et se dirigea vers les blessés. A quoi pensait-il à cet instant? A
la prophétie qui était en train de s’accomplir? Au 6e attentat précédant le 7e
qui devait lui devenir fatal? Nous ne le saurons jamais parce qu’un deuxième
terroriste se précipita vers l’empereur et une nouvelle explosion retentit. La
prophétie s’accomplit. Alexandre II décéda le jour même dans son palais. « Volonté du peuple » fut bientôt démantelée
et ses dirigeants exécutés. Les terroristes ne parvinrent pas à renverser la
monarchie car le nouveau tsar Alexandre III gouvernait d’une main de fer en
réprimant toute dissidence.
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