En 1929, Aleister Crowley, l’un des plus grands occultistes du XXème, vivait à Paris. Seulement, les autorités de l’époque ne voyait pas d’un très bon œil la présence de celui qui était surnommé « l’homme le plus malsain du monde ».
Aleister Crowley était un baronnet anglais et une figure aussi adulée que crainte par ses contemporains. Aujourd'hui, son influence est encore impressionnante et beaucoup de celles et ceux qui s’intéressent aux sciences occultes lisent ses écrits.
De son vivant, il a parcouru le monde. Il a visité la Chine, a quasiment réussi l’ascension de l’Himalaya et a même rencontré des lamas sacrés sur le Mont Kailash. Même si ses prouesses en magie étaient reconnues de tous, il était également accusé de choses incroyables et horribles.
Ainsi certains journaux américains lui reprochaient d’avoir fait brûler des femmes vivantes, d’avoir bu le sang de jeunes enfants ou encore d’avoir été un espion allemand en Amérique. La police française lui reprochait d’avoir eu des relations intimes avec un infant d’Espagne. Cependant, l’occultiste britannique a toujours nié ces accusations et a toujours affirmé ne s’intéresser qu’à la magie. Il prétendait que « [la magie] élève l’âme au-dessus de ces petites contingences ».
La justice française avait pris la décision d’expulser hors de l’hexagone Aleister Crowley. Quelques jours avant qu’il ne quitte le territoire, un journaliste du quotidien Paris-midi l’avait rencontré chez lui dans un appartement situé dans l’avenue de Suffren (une voie qui délimite les 7ème et 15ème arrondissements de Paris).
À l’époque, le magicien était alité et une infirmière à domicile prenait soin de lui. Crowley a ainsi débuté l’entretien :
« On veut m'expulser. Je proteste. D'ailleurs, je suis malade, très malade. II faudrait me transporter... Déjà, on a reconduit a la frontière ma fiancée - une Nicaraguaine divorcée d'avec un Français — Mme Ferrari de Miramar, et aussi mon secrétaire, Israël Regardi, un Américain de 21 ans qui est déjà un des maîtres de la Kabbale... »
Qu’est-ce qu'on vous reproche ?
« D’être un espion.. Ils ne comprennent rien ! Oui, c'est exact, j'ai participé très activement au contre-espionnage allemand en Amérique pendant la guerre, mais j'étais d'accord avec le Naval-Intelligence-Service de mon pays ! J’ai contrebalancé par mon influence la formidable organisation allemande qui a sévi aux États-Unis de 1914 à 1917. Je me suis fait passer auprès des Allemands et, particulièrement, auprès de l’ambassadeur, Von Bernsdorf, pour un révolutionnaire irlandais. Alors, n'est-ce pas, j'ai été bien obligé, pour faire croire cela, de publier des articles violents contre mon pays, dans The Fatherland. C est là que le 3 janvier 1917, j'ai suggéré que l'Angleterre devait devenir une colonie allemande. C'est là aussi que j'ai écrit, dans votre langue, l'Appel au bon sens français, ou je proclamais que Angleterre jouait son alliée et cherchait à tirer le maximum de profit de l’effroyable conflagration. »
Je me souviens. Cet article a eu alors un retentissement formidable. Vous nous avez conseillé une paix séparé. N'alliez-vous pas un peu loin dans... votre jeu ? Et un peu fort ?
« Il fallait que je fasse cela pour avoir la confiance des Allemands. J'avais mon but... »
Ce but ?
« Faire couler les navires américains encore neutres, par les sous-marins allemands. »
Hein ! Je ne comprend plus !
« Oui, ainsi de cette façon l'Amérique était obligée d'entrer en guerre à nos côtés. J’étais d'ailleurs toujours d’accord avec le capitaine Gount, chef de l’Intelligence-Service en Amérique. Aujourd’hui, Gount est lord-amiral et je lui ai télégraphié de m'envoyer une lettre pour me disculper auprès de votre gouvernement. »
Vous habitez la France depuis quand ?…
« Depuis vingt-six ans. Mais je voyageais. Depuis six ans, j'habite Paris sans interruption. »
Il y a donc eu dernièrement un fait nouveau... ?
« Aucun. On avait promis qu'il ne serait plus pris contre moi aucune sanction pour faits de guerre. Mais il y a eu mes histoires de vie privée et l’incompréhension de mes rites de magie. Ceci est une autre histoire… »
Le fils illégitime d’Aleister Crowley, Amado Crowley, a récemment publié deux livres sur son père (Les secrets d’Aleister Crowley, publié en 2012 et Les Enigmes d’Aleister Crowley, publié en 2013) afin de le réhabiliter. Dans ces deux ouvrages, il lève les nombreuses ambiguïtés qui entoure son père et démontre que ce dernier a grandement aidé l’Angleterre au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Amado présente son père comme un maître spirituel qui lui a transmis toute sa sagesse.
Aleister Crowley sur le K2 en 1902
- Sir Aleister Crowley sera expulsé de France demain, Paris-midi, 16 avril 1929
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